Fanfonne Guillierme


On ne le répétera jamais assez
. Le prénom de Fonfonne Guillierme c’est Fanfonne, avec un A comme Aimargues où elle vivait, où elle est décédée en janvier 1989 et où en mars 2008, comme chaque année, on  a célébré son souvenir. Arlésiennes tous rubans dehors, discours, gardians en veste noire, fifres, tambourins et chevaux blancs qui sont comme les boules de   neige de ce pays sans neige. 
Fanfonne Guillierme était protestante, vouvoyait les siens et employait l’imparfait du subjonctif . Elle avait passé son enfance en jouant au cerceau dans l’immeuble de l’ambassade de Hollande, au 55 avenue Kléber, dans le chic XVIe arrondissement. Mais pour être née à Paris au dessus des Pays Bas elle avait, du  coté du Vistre, du pays d’en bas, des racines aussi profondes que la saladelle des marais qui, par parenthèse n’en a pas beaucoup, de racines.
Un de ses ancêtres avait donné un «Thémistocle»pour l’inauguration, en 1803, du théâtre de Nîmes. Son arrière grand père maternel, Emile, juge à Nîmes, avait au milieu du XXe siècle et des vignes, acheté le mas de Praviel à Aimargues  où Antoinette, dite Fanfonne, jamais mariée, lisait la bible, débourrait des chevaux camarguais, élevait des bious d’abord d’origine Baroncelli-Granon puis Lescot-Raynaud. Du grand sang. Son grand père Julien faisait le bien et servait la cartagène aux gardians de passage. On l’appelait le «Bon Dieu.» Petite fille donc du «Bon Dieu»,Fanfonne, sous son grand chapeau noir, est devenue comme l’icône incontournable de ce pays agrippé à ses traditions. Elle avait connu Mistral.
Comme D’Arbaud, comme Baroncelli, comme Aubanel,  Mademoiselle Guillierme, tout en gardant ses bonnes manières, assumera totalement la dureté physique du métier de manadier : le soleil, la pluie, le chaud, le froid, les doigts qui gèlent, les cordes à tirer, les bêtes à retrouver, les heures interminables en selle et le souci toujours du troupeau. D’où sont sortis, sous l’azur et or de sa devise quelques grands cocardiers : Tegel, Pimpan, Charmentoun, Messorgue, Galapian, biou d’or en 1968,Fangous, Vidourle, Estepous, Segren, fils de la vache Magali et de Romarin, biou d’or en 1983. Dans cet univers d’hommes rudes, aux prérogatives jalouses et aux colères comme les crues de Vidourle elle sera leur égale et sur le terrain même de leur pouvoir : le taureau, le cheval qu’elle pratiquera jusqu'à 75 ans passés. De sa fameuse 2cv, elle commandait à ses gardians, les fameux frères Espelly, avec un fond d’accent doré sur tranche et un peu pointu. S’il tranchait dans le paysage, il marquait en même temps que son choix de vie loin de Paris disait la légitimité de la cause de ce sud pastoral.
De ce vieux sud d’entre les vieux Rhône qui défile dans les rues d’Aimargues  et joue sa musique pour lui rendre hommage.

Jacques Durand